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Ma position concernant la déclaration de 1978

(Levée de l’interdiction de l’exercice de la prêtrise par les descendants de Cham)


Cet article n’est pas un réquisitoire contre Jean Dressayre qui a par ailleurs produit un certain nombre d’articles de réflexion sur des sujets aussi divers que l’existence de Dieu, la parole de Sagesse ou la multiplicité des églises chrétiennes. Mais son texte fouillé au sujet de la déclaration du 30 septembre 1978 (1) réclame de ma part une approche apportant certains éclairages.


Dans la communauté mormone, que nous soyons issus de l’Église majoritaire ou des courants frères, nous n’avons pas pour habitude (malgré nos différences) de nous invectiver sur des sujets doctrinaux. Toutefois quand ils touchent à des fondamentaux, il semble important – tout en clarifiant les diverses positions – de les argumenter de façon solide.


Jean Dressayre, comme pour tous ses travaux, a mené sa réflexion avec beaucoup d’intelligence, n’oubliant pas de rapporter des évènements historiques, sociologiques et doctrinaux afin d’étayer la position officielle de l’Église majoritaire – bien qu’elle soit relativement récente – Mais le fondamentalisme se doit par essence de regarder non seulement des énonciations antérieures puisées dans le creuset du rétablissement – mais aussi d’analyser la cohérence d’une attitude qui se déclare avoir été modifiée.


Quand on lit la déclaration du 30 septembre 1978, on note un certain nombre d’éléments.


Elle a été publiée après avoir été validée par un vote des Autorités Générales comme des membres de l’Église lors de la 148è conférence officielle de l’Église. Spencer W Kimball était à l’époque le Prophète-Président en exercice.


La phrase la plus importante de cette déclaration est la suivante :


« … tous les membres masculins de l’Église qui en sont dignes peuvent être ordonnés à la prêtrise sans considération de race ou de couleur ».


Je suis d’ailleurs surpris des mots employés dans la déclaration qui annoncent : « Les dirigeants de la prêtrise sont priés de respecter la procédure consistant à avoir un entretien approfondi ¨ avec tous ceux qui sont candidats ¨ à l’ordination à la prêtrise d’Aaron ou à la prêtrise de Melchisedek pour s’assurer qu’ils répondent aux conditions de dignité requises ».

Je serais presque stupéfait par ce terme de « candidat », sachant que la prêtrise est dispensée dans l’Église sur appel et non par requête d’un postulant !


Le Président Kimball a bien précisé dans la lettre qui a été présentée par son Conseiller N Eldon Tanner que la déclaration de 1978 était inspirée par une révélation qu’il avait reçue dans les salles sacrées du temple de Salt Lake City. Cependant, elle n’a pas été inscrite sous la même forme que les nombreuses autres révélations composant les Doctrine & Alliances (recueil des révélations modernes). Il s’agissait en réalité de la seconde déclaration précédée par celle mettant un terme à la polygamie du 6 octobre 1890.

Dans la plupart des révélations contenues dans ce livre, Dieu a parlé à travers de nombreux Prophètes, déclarant « Ainsi parle le Seigneur » Rien, ni personne ne s’explique pourquoi les « Révélations » depuis 1890 n’ont pas suivi le même processus ? Surtout quand on analyse la première déclaration où seul le Prophète s’implique en déclarant « Ceci est mon conseil ! » :


« Et je déclare maintenant publiquement que mon conseil aux Saints des Derniers Jours est de s’abstenir de contracter tout mariage interdit par la loi du pays ».

-Wilford Woodruff, Président de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.


En substance que lisons nous donc dans cette déclaration du 30 septembre 1978 ?


La prêtrise peut à présent être transmise à tous les hommes ! Cela veut-il dire qu’il y avait précédemment une restriction selon certaines races ou couleur de peau ?

Une race oui, d’ailleurs la seule : celle des descendants de Caïn, fils maudit d’Adam, le premier homme. Cette malédiction voulue par le Seigneur pour condamner le meurtre de son frère revêtait une forme particulière : la couleur de peau.

La lignée se poursuivit après le déluge par l’un des fils de Noé (Cham) qui avait épousé Egyptus, elle-même descendante de Caïn.


Contrairement à ce que semble démontrer Jean Dressayre, est-il raisonnable de penser que l’un quelconque des hommes de couleur de peau foncée aujourd’hui, ne soit pas un descendant de cette lignée, y compris les aborigènes d’Australie, dont on sait qu’ils vinrent il y 70.000 ans d’Afrique (ce qui est aujourd’hui attesté par leur génome) ? On connaît cependant la position de David O McKay qui considérait que les peuples des Iles du Pacifique issus des Lamanites n’étaient pas concernés par la lignée de Cham, mais il est difficile d’avoir une position tranchée à l’égard d’autres peuples à peau foncée comme les Mélanésiens ou les Dravidiens. Pourtant après des études sérieuses de scientifiques, les Négritos des Philippines et d’Indonésie sont bien d’origine africaine. On note qu’ils recevaient pourtant la prêtrise avant 1978. Seule donc une bénédiction patriarcale peut déterminer l’origine raciale d’un enfant de Dieu. Il y a eu certes depuis ces temps reculés des brassages qui pourraient en effet nous faire penser que des hommes à la peau relativement claire aujourd’hui pourraient être en réalité de vrais descendants de la lignée maudite par Dieu. Le livre de Mormon lui-même nous rapporte l’histoire des Lamanites et nous explique comment avec le temps beaucoup furent sauvés par le repentir :

« Voici, les Lamanites, vos frères, que vous haïssez à cause de leur souillure et de la malédiction qui est tombée sur leur peau, sont plus justes que vous » (Jacob 3 : 5,8-9).


Dieu avait jeté le même genre de signe sur les méchants. Pour les accueillir à nouveau, il avait donc levé le signe !


Néphi expliquait :


« Et il avait fait tomber la malédiction sur eux, oui, une grande malédiction, à cause de leur iniquité. Car voici, ils s'étaient endurci le cœur contre lui, de sorte qu'il était devenu semblable à un caillou; c'est pourquoi, comme ils étaient blancs et extrêmement beaux et agréables, afin qu'ils ne fussent pas séduisants pour mon peuple, le Seigneur Dieu fit venir sur eux une peau sombre. Et ainsi dit le Seigneur Dieu : Je les rendrai repoussants pour ton peuple, à moins qu'ils ne se repentent de leurs iniquités. » (2 Néphi 5:21-22).


On remarque que dans les éditions récentes du livre de Mormon, l’expression « peau sombre » a été remplacée par : « noirceur ». Il n’en demeure pas moins que Néphi parlait bien plus haut de la couleur de la peau et non d’un état de l’esprit.

Cette question indiscutable par les hommes a été décrétée par Dieu lui-même et nous devons avoir confiance dans ses décisions. Il est ainsi important de déterminer par la bénédiction patriarcale si un enfant de Dieu est de véritable descendance Chamite ou non.


La déclaration de 1978 dit que tous les hommes sont à présent égaux, mais ne dit à aucun moment qu’en réalité seuls les Chamites sont concernés, puisque aucun autre peuple n’a jamais été écarté de la prêtrise comme eux. Il était en effet assez difficile pour l’Église de ne pas paraitre « sectaire » en nommant explicitement les « noirs » ! Mais sans vouloir taxer ses dirigeants d’hypocrisie, nous devons relever ce point troublant.


Jean Dressayre a l’honnêteté de préciser :


« Le 1er juin 1978, dans le temple de Salt Lake City, le Seigneur parla au prophète Spencer W Kimball et leva l’interdiction de la prêtrise dont était frappé le lignage chamitique. Quelques semaines plus tard, les premiers noirs de lignage africain étaient ordonnés à la prêtrise et leurs familles recevaient les ordonnances supérieures du temple.


Malgré cela, et encore aujourd’hui, certains fidèles de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, de race noire ou blanche, ne croient pas que la malédiction de Caïn venait de Dieu. Ils croient que c’est une erreur d’interprétation des premiers dirigeants de l’Eglise et qu’elle n’aurait jamais dû se produire. D’autres croient que l’Eglise n’a jamais vraiment enseigné ce point de doctrine, que c’était simplement l’opinion de certains membres ou même peut-être d’un petit nombre d’apôtres.


Pourtant l’examen attentif de toutes les données historiques révèle que l’interdiction de la prêtrise était basée uniquement sur la doctrine de la malédiction de Caïn. Qu’elle a toujours été présentée par les dirigeants de l’Église comme une doctrine de l’Église depuis le commencement. Elle n’a jamais, à aucun moment, été présentée comme une simple opinion ou supposition ».


L’étude de frère Dressayre, encore une fois est très intéressante sur le plan sociologique, car elle précise bien des aspects de l’évolution de la pensée et de l’interprétation de la « malédiction ». Il nous faut cependant rester parfaitement pragmatique en émettant cette simple pensée : Si Dieu avait réellement voulu lever la condamnation, n’aurait-il pas tout simplement levé le « signe » aussi ?


Certes discourir sur un sujet aussi grave (surtout de nos jours) nous pousse à imaginer que les Mormons Fondamentalistes (en général) reconnaissent que tous les hommes ne sont pas égaux et seraient donc enclins à considérer les noirs comme un peuple inférieur et assujetti aux autres enfants de Noé (Genèse 9:20-26). Ceci n’est pas une décision d’homme, mais une déclaration divine qui s’est naturellement largement assouplie depuis l’époque.


Les Mormons Fondamentalistes Indépendants pour leur part, considèrent que les noirs en général et les Chamites sont loin d’être des animaux ou des esclaves. Ce sont des hommes, des enfants de Dieu qui malgré tout portent un lourd héritage, tout en étant appelés à de grandes bénédictions. Le Seigneur leur a retiré depuis Noé le simple droit d’agir en son nom en leur refusant la prêtrise. Toute punition est destinée à être levée un jour. Le Seigneur décidera du moment opportun et le fera savoir de la manière la plus solennelle qui soit !


Nous n’hésitons pas à penser très sérieusement que l’Église majoritaire concernée par son besoin d’expansion et probablement touchée par la misère spirituelle des membres de couleur, a voulu considérer que le temps était venu de lever elle-même la sanction. Le développement de ses structures en Afrique et d’autres pays largement touchés par le métissage comme le Brésil en sont l’un des signes. Nous savons que les hauts dirigeants ont abondamment discuté du problème et ont été durablement interpellés par des organisations anti-raciales sur ce changement d’attitude.


Déjà en 1969, David O McKay étant malade, ses Conseillers Hugh B Brown et Eldon Tanner tentèrent de convaincre le Collège des Douze d’abroger la discrimination. C’est Harold B Lee qui trancha déclarant : « la croyance telle que révélée dans l'Ancien Testament établit que les races devaient rester chacune de leur côté » (David O McKay par Gibbons, p.417). Avec l’appel d’Harold B Lee comme 1er Conseiller de Joseph Fielding Smith, cette velléité fut étouffée dans l’œuf ! Ce nouveau Président évoqua d’ailleurs une nouvelle explication sur la différence des races reprenant la théorie des « moins vaillants » (articulée précédemment par Orson Pratt et Brigham H. Roberts) :


« Il y a une raison pour laquelle tel homme naît noir avec d’autres désavantages tandis qu’un autre naît blanc avec de grands avantages. La raison est que nous avons eu autrefois un état avant de venir ici et y avons été plus ou moins obéissants aux lois qui nous ont été données là-bas. Ceux qui ont été fidèles en tout là-bas ont reçu de plus grandes bénédictions ici, et ceux qui n’étaient pas fidèles ont reçu moins. »

-Joseph Fielding Smith, Genealogical and Historical Magazine, 1931-32, vol. 17, p. 154 ; voir Doctrine du salut, 1954, vol. 1, pages 65-66 de l’édition française.


Il est absolument certain que l’Église majoritaire n’a jamais été une église raciste. De nombreuses déclarations l’affirment et Joseph Smith lui-même était abolitionniste. Il est même probable que précédemment à la découverte du Livre d’Abraham qui donne des précisions sur l’origine de la malédiction de Dieu, ce sujet était très peu évoqué dans l’Église avant 1844. C’est Brigham Young qui a le premier énoncé : « La postérité de Cham qui par lui est la postérité de Caïn, selon la malédiction encourue par lui, sera l’esclave de ses frères, elle sera l’esclave des esclaves de ses semblables jusqu’à ce que Dieu enlève la malédiction et nul pouvoir ne pourra l’empêcher. » -Brigham Young, Journal of Discourses, vol. 12, page 184


Nous sommes les premiers concernés par le retour dans le sein du peuple de Dieu de tous les bannis ou les dispersés, des noirs aux tribus perdues d’Israël. Nous sommes aujourd’hui dans la dernière dispensation. Les choses se mettront en place, mais nul ne connaît l’heure ni le lieu !


Frère Germain


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